563 resultados para Terry McMillan
Resumo:
Pour la pensée humaine, l’image a toujours constitué une interrogation laissée sans réponse définitive : de l’interdit biblique à la possibilité technologique infinie, l’image a traversé des étapes conceptuelles complexes et hétérogènes. Aujourd’hui, on conçoit l’image comme une présence incontournable de l’existence quotidienne et comme une forme de réflexion mystérieuse. Cette thèse propose une analyse de la vision sur l’image chez Walter Benjamin et Aby Warburg à travers quelques concepts essentiels : image de pensée, survivance, espace de pensée, coupure, représentation de l’histoire. Située énigmatiquement entre les arts visuels et la pensée philosophique, l’image devient un sujet de réflexion à la fin du 19e siècle et au début du 20e siècle; les deux penseurs mentionnés ont été les premiers à interroger les valeurs conceptuelles de l’image et à chercher de l’évoquer en tant que spectre de la pensée. Les morceaux aphoristiques et les articles critiques de Benjamin rencontrent discrètement les études esthétiques de Warburg au point où l’idée de l’image amorce toute réflexion. Pour l’imaginaire contemporain, les structures conceptuelles bâties par Benjamin et Warburg constituent des éléments dominants dans l’engrenage réflexif atonal d’aujourd’hui. Lorsque le Denkraum (espace de pensée) et le Denkbild (image de pensée) gèrent la dynamique de la philosophie de Benjamin et Warburg, le Nachleben (survie) et la coupure nuancent le grand tableau de l’histoire (Geschichtsdarstellung). L’analyse comparatiste de ces concepts aboutit à la conclusion que l’image est intimement et paradoxalement liée à la vision de l’histoire; en fait, l’image n’est qu’une représentation de l’histoire qui, à son tour, se représente dans chaque image.
Resumo:
Ce mémoire démontre que la pratique littéraire de l’écrivain américain Ralph Waldo Emerson s’inscrit dans le sillage de la tradition des exercices spirituels mise au jour par l’helléniste Pierre Hadot et qu’elle permet de penser une modernité insoupçonnée par ce dernier. La production de textes littéraires devient alors une manière d’établir « une relation originale avec l’univers » (cf. l’introduction de Nature). Le premier chapitre explique la spécificité de la spiritualité traditionnelle, où l’écriture consiste à implanter en soi le texte de la tradition. La pratique littéraire de Marc Aurèle, Sénèque et saint Augustin est étudiée afin de montrer comment ils tâchent de vivre conformément à la conception de la transcendance qui est la leur : personnelle chez les stoïciens, institutionnelle chez les chrétiens. Le deuxième chapitre montre comment Emerson renverse le rapport traditionnel au texte dans la vie de l’esprit en arguant que la révélation du Christ est, à l’origine, une expérience personnelle de la transcendance qui n’est pas institutionnalisable. Il se dégage de cette confrontation romantique avec le christianisme un concept de littérature lié au mysticisme et inséparable d’une compréhension « expressiviste » du langage (Charles Taylor). Le dernier chapitre examine l’ascèse littéraire d’Emerson : sa conception antiscolastique du « scholar » est étudiée puis mise en relief avec sa façon d’arrimer sa pratique de la pensée à une conception fluctuante de l’univers. La dernière section porte sur la façon dont son mode de vie expérimental suppose une conception de la littérature en tant que processus.
Resumo:
Étant tous les deux récits d’événements, l’histoire et le roman ne sont pas logés à la même enseigne : le contenu du texte romanesque est habituellement considéré comme le contraire de celui du texte historique. On suppose que l’histoire raconte les vraies choses alors que le roman excelle dans l’imaginaire. Dans la représentation des génocides, le discours romanesque et celui historique partagent de nombreuses stratégies narratives à partir desquelles se réalise la relecture de l’expérience tragique. De nombreux artifices incitent le discours à se contenter d’être le (trans)porteur d’une conscience souveraine qui transcende les faits, le temps et l’espace reliés à l’événement. Ni l’histoire ni le roman ne sont reconstitutions expérientielles, mais le procédé de mise en récit doit démontrer une épaisseur discursive pouvant produire chez le lecteur la représentation d’un monde. Cette thèse prend pour objet les modalités littéraires des récits et des romans qui essayent de représenter l’expérience du génocide. En analysant ce dispositif discursif qui ne fait plus de différence entre le réel, le vrai et la vraisemblance, les livres de notre corpus présentent l’expérience du génocide et pensent les brisures et les déchirures d’humanité constatées dans différentes régions du monde (dans l’Empire ottoman, dans l’Allemagne nazie, en Bosnie, au Rwanda, etc.). Dans cette perspective, nous examinons la littérarisation de ces événements horribles qui se déroulent suivant un schéma narratif formé de séquences véridiques et de scènes imaginaires mettant en exergue toutes les innovations stylistiques et langagières qui font la singularité et l’originalité des ces œuvres. Fort de ces spécificités, les quatre principaux romans de notre corpus (Journal de déportation, Être sans destin, Le soldat et le gramophone et Le Passé devant soi) s’appuient sur une vraisemblance littéraire ou poétique qui leur permet d’aller à la quête d’une vérité ; une vérité littéraire non seulement subjective, mais en mesure d’accompagner la vérité historique.
Resumo:
Les premiers comptes rendus de l’histoire du cinéma ont souvent considéré les premiers dessins animés, ou vues de dessins animés, comme des productions différentes des films en prise de vue réelle. Les dessins animés tirent en effet leurs sources d’inspiration d’une gamme relativement différente d’influences, dont les plus importantes sont la lanterne magique, les jouets optiques, la féérie, les récits en images et les comics. Le dessin animé n’en demeure pas moins fondamentalement cinématographique. Les vues de dessins animés de la décennie 1900 ne se distinguent ainsi guère des scènes à trucs sur le plan de la technique et du style. D’abord le fait de pionniers issus de l’illustration comique et du croquis vivant comme Émile Cohl, James Stuart Blackton et Winsor McCay, le dessin animé s’industrialise au cours de la décennie 1910 sous l’impulsion de créateurs venant du monde des comics, dont John Randolph Bray, Earl Hurd, Paul Terry et Max Fleisher. Le processus d’institutionnalisation par lequel le dessin animé en viendra à être considéré comme une catégorie de film à part entière dépend en grande partie de cette industrialisation. Les studios de dessins animés développent des techniques et pratiques managériales spécifiquement dédiées à la production à grande échelle de films d’animation. Le dessin animé se crée ainsi sa propre niche au sein d’une industrie cinématographique dont il dépend toutefois toujours entièrement. Ce phénomène d’individuation repose sur des formules narratives et des personnages récurrents conçus à partir de modèles issus des comics des années 1910.
Resumo:
L’objectif de la thèse est de montrer en quoi le roman ou la littérature incarne une forme de connaissance qui lui est propre, que Pierre Klossowski appelle la « connaissance pathétique ». Celle-ci fait appel aux passions plutôt qu’à la seule raison et repose sur des percepts et des affects bien davantage que sur des idées et sur des concepts. L’œuvre romanesque de Georges Bataille et de Pierre Klossowski me servira d’exemple et d’objet d’analyse, dans la mesure où l’écriture fictionnelle y est toujours au service d’une ‘’passion’’ philosophique, dans laquelle l’auteur entraîne ses personnages en même temps que le lecteur. Cette « connaissance pathétique » que le sujet est amené à vivre passe notamment par les mécanismes d’une écriture qui tente d’énoncer l’innommable. Cette orientation esthétique suit la voie tracée par Nietzsche, et les grandes thématiques associées à ce dernier constituent à la fois, au niveau de l’énoncé, un contenu thématique et diégétique récurrent (par exemple : dans Le Baphomet, nous sommes en présence du personnage de Friedrich l’Antéchrist) et, au niveau de l’énonciation, une stratégie narrative qui consiste à piéger le lecteur dans un système d’interprétations ambiguës, contradictoires et provocatrices qui déclenchent chez lui une activité cognitive effrénée, de nature passionnelle ou pathétique (par exemple : Le récit Les lois de l’hospitalité commence par un avertissement au lecteur, où on le met en garde contre « l’attrape concertée » que représente le récit). J’étudierai en détail, sur le plan de l’expression et du contenu, ces stratégies cognitives de la transgression et du simulacre grâce auxquelles l’auteur amène ses personnages et son lecteur à éprouver des pensées comme une forme de passion. L’analyse de la poétique pathique comme forme privilégiée de l’écriture narrative chez Pierre Klossowski et chez Georges Bataille nécessitera le recours à une analyse de l’œuvre de Nietzsche et de Sade dans un premier temps pour retracer ce qui est l’enjeu de la réception de ces œuvres par les deux auteurs français. Dans un deuxième temps, l’analyse des œuvres de Georges Bataille et de Pierre Klossowski me permettra de comprendre comment elles déclenchent chez le lecteur une expérience pathétique où la difficulté d’atteindre à une connaissance rationnelle univoque déclenche chez le destinataire du texte une activité cognitive complexe de nature proprement littéraire ou romanesque. Enfin, le corpus qui me servira d’exemple dans la description de ces phénomènes sera constitué des principales œuvres discursives de Bataille et de Klossowski (L’expérience intérieure, Nietzsche et le cercle vicieux) ainsi que de leurs œuvres romanesques (L’histoire de l’œil, Divinus Deus, L’abbé C., La vocation suspendue, Les lois de l’hospitalité et Le Baphomet).
Resumo:
Cette thèse prend pour objet le concept et les modalités du destin tel qu'il est articulé dans le Cycle de Dune de Frank Herbert. Le destin est une des interrogations les plus anciennes de l'humanité. Initiatrice des grands questionnements de l'être sur sa liberté et sur lui-même, la pensée sur le destin est intimement liée au développement des civilisations. Marque des chan- gements majeurs au cœur de l'être, l'évolution du concept de destin se lie également avec les grandes découvertes scientifiques: les nouveaux savoirs sur la nature et le monde changent la manière qu'a l'humain de se considérer lui-même dans cet environnement; il se redéfinit avec chaque découverte, devient restrictif ou expansif, offre l'idée d'une liberté humaine inexistante ou ne souffrant d'aucune limite autre que la mort. Penser le destin, c'est penser l'humain dans sa plus intime conception. Sur cette toile de fond, la première partie de cette étude porte sur l'évolution du concept de destin dans la pensée occidentale, de la civilisation grecque à l'épo- que moderne, en passant par les réflexions métaphysiques sur le rôle de la transcendance dans la vie de l'humain. Au travers de cette étude diachronique, le destin est analysé afin de mettre en avant l'idée que l'individu cherche toujours plus de liberté dans son existence. La deuxième partie aborde l'évolution de la science et l'impact de cette évolution dans la pensée de l'humain sur le monde et lui-même. Dans le contexte de cette deuxième partie, la thèse explicite le rôle joué par la science, ainsi que par le discours de la science-fiction, dans les efforts humains de prendre en main son destin, de devenir de plus en plus libre. Enfin, dans la dernière partie, l'analyse du Cycle de Dune sous l'angle des trois personnages que sont Paul, Alia et Leto 2 met en avant une vision transhistorique du concept de destin, afin de pouvoir aborder son évolution prochaine, qui ne le limite plus à l'individu, mais qui place l'humain dans l'univers.
Resumo:
This thesis is concerned with the interaction between literature and abstract thought. More specifically, it studies the epistemological charge of the literary, the type of knowledge that is carried by elements proper to fictional narratives into different disciplines. By concentrating on two different theoretical methods, the creation of thought experiments and the framing of possible worlds, methods which were elaborated and are still used today in spheres as varied as modal logics, analytic philosophy and physics, and by following their reinsertion within literary theory, the research develops the theory that both thought experiments and possible worlds are in fact short narrative stories that inform knowledge through literary means. By using two novels, Abbott’s Flatland and Vonnegut’s The Sirens of Titan, that describe extra-dimensional existence in radically different ways, respectively as a phenomenologically unknowable space and as an outward perspective on time, it becomes clear that literature is constitutive of the way in which worlds, fictive, real or otherwise, are constructed and understood. Thus dimensions, established through extensional analogies as either experimental knowledge or modal possibility for a given world, generate new directions for thought, which can then take part in the inductive/deductive process of scientia. By contrasting the dimensions of narrative with the way that dimensions were historically constituted, the research also establishes that the literary opens up an infinite potential of abstract space-time domains, defined by their specific rules and limits, and that these different experimental folds are themselves partaking in a dimensional process responsible for new forms of understanding. Over against science fiction literary theories of speculation that posit an equation between the fictive and the real, this thesis examines the complex structure of many overlapping possibilities that can organise themselves around larger compossible wholes, thus offering a theory of reading that is both non-mimetic and non-causal. It consequently examines the a dynamic process whereby literature is always reconceived through possibilities actualised by reading while never defining how the reader will ultimately understand the overarching structure. In this context, the thesis argues that a causal story can be construed out of any one interaction with a given narrative—underscoring, for example, the divinatory strength of a particular vision of the future—even as this narrative represents only a fraction of the potential knowledge of any particular literary text. Ultimately, the study concludes by tracing out how novel comprehensions of the literary, framed by the material conditions of their own space and time, endlessly renew themselves through multiple interactions, generating analogies and speculations that facilitate the creation of new knowledge.
Resumo:
Cotutelle de thèse réalisée en littérature comparée (option épistémologie) avec l'Université de Montréal sous la direction de Terry Cochran et en philosophie avec Paris X (Nanterre) sous la direction d'Alain Milon.
Resumo:
La question posée dans ce mémoire concerne ce que des philosophes comme Georg Lukács, Walter Benjamin et Theodor. W. Adorno appellent le contenu de vérité des œuvres littéraires. Le but de ma réflexion est de montrer qu’un tel contenu de vérité ne doit pas être recherché dans la réalité extra-littéraire par rapport à laquelle la littérature apparaît comme une représentation, pas plus que dans les intentions introduites du dehors par l’auteur ou dans la réception de l’œuvre par ses lecteurs, mais plutôt directement dans la sphère de sa production. À partir d’une lecture comparative des différentes positions défendues dans le débat des années 1930 entre Georg Lukács, Walter Benjamin, Bertolt Brecht et Ernst Bloch, la production littéraire est définie comme un phénomène par lequel l’esprit, en s’objectivant, transcende la réalité dans laquelle il s’inscrit. Il en résulte une conception du littéraire comme processus au sein duquel la relation épistémologique entre le sujet et l’objet est appréhendée d’une manière irréductible aux autres formes de connaissance.
Resumo:
Aucune figure, au XXe siècle et aujourd'hui, n'est comparable au zombie. Sa prolifération et sa réitération en font un cas d'étude exceptionnel. Or, une figure est inséparable des discours qui la voient naître. Il existe un subtil et profond arrimage entre la production d'une figure, son interprétation et l'économie de sens qui la voit naître. Ma modeste ambition, dans ce mémoire, s'insère dans une réflexion à caractère épistémologique où les enjeux narratifs et les notions critiques encadrant le phénomène zombie seront interrogés. De même, afin de faire émerger cette économie de sens, les modalités de sens de la métaphore doivent être cernées. Ce mémoire est donc une série de prolégomènes nécessaires à l'intelligence d'un important problème contemporain : l'interprétation d'une figure telle que le zombie. Le premier chapitre est une synthèse des manifestations de la figure et de sa compréhension. Les années 60 opèrent une importante transformation dans le corpus filmique zombie (et d'horreur) qui s'incarne dans Night of the Living Dead, de George Romero. Le second chapitre s'intéresse aux enjeux narratifs et aux notions critiques qui encadrent le phénomène zombie. La distinction entre thématique et esthétisme s'incarne alors dans la séparation stricte entre forme et contenu et se fait sentir dans les interprétations offertes du phénomène de l'horreur et dont les études sur le zombie sont tributaires. Cela fait, je rappellerai la vision de Todorov et d'Ingarden sur la représentation afin de cerner les enjeux véritables d'une interprétation. En définitive, la question sera de savoir si le zombie peut être pris à la lettre. Le troisième chapitre sera le moment d'interroger la métaphore afin qu'émergent les modalités de sens qui lui sont inhérentes. Ce chapitre se divisera en deux parties qui reprennent les moments essentiels de la métaphore : sa production et sa lecture. Pour ce faire, je parcourrai la tradition théorique sur la métaphore afin de saisir la portée de l'affirmation poétique qui établit un rapport métaphorique entre les zombies et les humains. Quelle est la signification de cette affirmation qui assume et guide la mise en récit d'une figure (le zombie), et qui assume et guide une lecture métaphorique de l'être humain? En guise de conclusion, je réfléchirai sur les modalités de la lecture en vue d'une interprétation de la figure du zombie. En ce sens, j'explorerai cette inséparabilité entre la manière, c'est-à-dire la métaphore, et son contenu, c'est-à-dire ses interprétations.
Resumo:
Ce mémoire s’intéresse aux transformations littéraires et poétiques mises en œuvre par le mouvement de la Beat Generation au milieu du vingtième siècle en Amérique du Nord. En me penchant sur le recueil de poésie « Howl and Other Poems » du poète Allen Ginsberg, le texte emblématique de cette révolution littéraire, je montre comment le mouvement des Beats représente une transformation dans la tradition littéraire et poétique américaine, occidentale, en ce qui concerne à la fois la forme, les sujets abordés et la pratique d’écriture. Dans un premier temps, j’étudie l’histoire de ces changements en examinant la réception de « Howl », qui a bouleversé les attentes du milieu littéraire de l’époque à cause de son approche inclusive qui accueille tout dans la représentation. Mon deuxième chapitre se penche sur la vision du poète, la vision poétique. Je montre comment la perspective du poète face au monde change chez Ginsberg et les Beats. Au lieu de concevoir la transcendance, l’universel, comme quelque chose d’éloigné du particulier, comme le véhicule la tradition poétique occidentale, les Beats voient l’universel partout, dans tout. Enfin, je m’intéresse à la place du langage dans l’expression de cette nouvelle vision. J’observe comment Ginsberg et les Beats, en s’inspirant de la poésie de Walt Whitman, développent un langage spontané ne relevant plus de la maîtrise de soi.
Resumo:
Afin de se perpétuer dans le temps, la tradition recourt à des figures qui la véhiculent. Cette étude prend pour objet la figure du vampire qui, en transmettant des aspects importants de la tradition culturelle, prend la forme d’une tradition en soi, se manifestant dans une série de récits et d’œuvres littéraires et culturelles. Ces figures possèdent le plus grand pouvoir de transmission puisqu’elles ne sont pas des traditions à la base, mais elles ne peuvent rester culturellement importantes seulement qu’en devenant des traditions. C’est-à-dire que la figure du vampire possède sa propre tradition littéraire et/ou filmique, tout en offrant une vision de la transmission, de la tradition et de l’éducation. Afin de demeurer présentes à travers le temps, les traditions doivent posséder un noyau principal, tout en restant assez malléables afin que des caractéristiques secondaires de celles-ci puissent changer et évoluer. Le vampire est une figure toute aussi malléable que les traditions, faisant donc d’elle l’emblème parfait du concept. De plus, cinq nœuds de tradition réapparaissent, à différents niveaux, dans la littérature vampirique. Le choix de la victime, la morsure vampirique et l’échange de sang transformatif – et le lien de ceux-ci à une vision perverse de la sexualité, le processus d’éducation, le désir d’appartenir à une famille ou à une communauté et le besoin de comprendre ses origines, illustrent tous le lien indéniable entre la figure du vampire et le concept de la tradition. Ce mémoire explore l’impact de la figure du vampire comme emblème de la tradition à travers le roman vampirique classique – le plus traditionnel – Dracula de Bram Stoker et à travers les trois premiers tomes des Vampire Chronicles d’Anne Rice, soit Interview with the Vampire, The Vampire Lestat et Queen of the Damned, ainsi que leurs adaptations cinématographiques.
Resumo:
L’époque actuelle se caractérise par un processus de sécularisation irrésolu. Les inconsistances de notre modernité relèvent à la fois d’une dissolution de l’hégémonie de la religion en occident et d’une diversification de régimes de valeurs, croyances et représentations ayant pour effet la persistance de différends idéologiques que le phénomène de globalisation à la fois accentue et résorbe sans les abolir. Cette thèse examine la pertinence de la traduction pour interroger les fondements littéraires des enjeux esthétiques et politiques de cette condition. En tant que procédé poïétique, modèle de subjectivité éthique et figure de pensée, la traduction constitue un dispositif littéraire intimement relié au problème de la sécularisation. Chacune des études qui composent la thèse cherche à approfondir, dans une perspective comparatiste, une intuition de base : le mode de dépossession inhérent au fait littéraire de traduire permet d’appréhender un certain ethos séculier dont le caractère historique ne serait pas totalement coupé d’un rapport à la transcendance dans le contexte de l’économie culturelle globale. Le problème de la traduction est abordé à partir de deux axes principaux : la distorsion de la tradition religieuse par la formation d’une religiosité d’ordre littéraire (un ethos séculier) et la distorsion d’un certain humanisme d’après l’expérience catastrophique et la manière dont cet ethos permet d’y survivre. Cette thèse vise à dégager de l’idée de traduction une capacité de régénérer un rapport éthique à autrui par la construction de liens inédits avec le passé et l’avenir ; une attention à la finitude humaine caractérisée par une disposition critique et affective face à ces artefacts humains que nous nommons littérature. Les écrits de la poète et traductrice Anne Carson jouent un rôle déterminant dans le cadre de cette recherche puisqu’ils exemplifient une capacité singulière de faire usage de la tradition qui permet d’envisager, ultimement, une régénération de la question du sens de l’humain, c’est-à-dire, d’une pensée sensible à l’inhumain entre nous.
Resumo:
Si la littérature est rarement considérée comme une science, comme vraie, comme créatrice d’un savoir, toujours un peu à l’écart, avec ses fictions, et ce malgré un médium, le langage, commun à la philosophie et dont la qualité discursive correspond au mode d’expression de la pensée, malgré sa place acquise parmi les disciplines académiques, c’est parce que nous refusons de voir quel rôle vital joue l’affect dans la naissance et l’élaboration de la pensée. Le rejet de l’affect par la science est lui-même le produit de plusieurs affects — peur, orgueil — à partir desquels nous créons le concept de « pensée » qui nous convient le mieux, qui nous rassure le plus : rationalité, linéarité, objectivité. En réalité, cette dernière est chaotique et subjective et c’est seulement à travers son expression dans le langage qu’elle s’ordonne et acquiert une apparence d’objectivité. Mais le langage est lui-même le produit d’affects : nulle vérité infaillible ne sous-tend l’élaboration de nos langues, de leurs règles grammaticales et des sens de leurs mots. Ainsi la littérature, malgré (ou à cause de) la fiction, les fables, les inventions, parce qu’elle est création langagière, parce qu’elle remet toujours en question le langage est, en réalité, plus lucide que la raison. De plus, toujours aux prises avec l’image, elle connaît, d’une certaine façon, l’affect. Elle tente de le représenter, afin de frapper et d’ébranler la conscience du lecteur. C’est à travers elle que j’ai voulu élaborer non pas un savoir rationnel, mais un savoir sur l’affect, un savoir affectif. Pensée critique et affect sont en effet deux composantes essentielles de la création littéraire, ce qui apparaît particulièrement dans l’œuvre d’Ingeborg Bachmann, qui compte à la fois une thèse en philosophie sur Heidegger, des recueils de poésie, de nouvelles, des essais et un cycle romanesque inachevé, Todesarten. Je me suis penchée plus précisément sur certaines de ses nouvelles ainsi que sur son seul roman achevé, Malina, afin d’y étudier la représentation de l’affect chez certains personnages féminins qui, pour éviter de trop souffrir, construisent autour d’elles un mur de mensonges. J’ai également porté une grande attention aux théories de Bachmann sur la littérature, qu’elle énonce dans ses Leçons de Francfort, ce qui m’a permis, en considérant en même temps ses œuvres de fiction de même que celles de quelques autres écrivains, d’expliquer (de façon non exhaustive) certains rôles de l’affect à la fois chez l’écrivain et chez le lecteur.
Resumo:
Cette étude s’organise autour d’une articulation : celle entre un médium (la photographie), une ville (Beyrouth), et les événements qui ont marqué son passé récent. Le thème des rapports entre la photographie et l’histoire, avec la pluralité de sens qui le décrit, vient, en arrière-fond de ces questions, délimiter l’horizon de cette étude ; le lien entre voir et savoir, antiquement aux sources de la connaissance historique (Hartog, Loraux), en représente la ligne de fuite. En premier plan, la relation photographique et historienne à l’événement constitue l’objet de cette recherche dont le propos est d’identifier dans la photographie une référence à l’histoire considérée en tant qu’écriture. Concrètement, cet argument se déplie sur deux mouvements. Il exige, dans un premier temps, une série d’analyses théoriques visant à étudier le potentiel de connaissance et le caractère formel de la photographie en qualité de représentation événementielle. En partant des expérimentations des avant-gardes (Lugon, Baqué), jusqu’au jumelage entre la photographie et la presse, il s’agira de montrer la part de lisibilité qui appartient aux narrations photographiques (Barthes, Lavoie). Ensuite, on prendra en considération le travail opéré par l’historien lors de l’opération historiographique visant à produire, autour de l’événement, une représentation historique (de Certeau, Ricœur, Ginzburg). Outre faire ressortir le caractère de visibilité qui appartient à l’écriture historienne, ce passage sera aussi l’occasion de produire une étude comparée de la photographie et de l’histoire (Kracauer) autour de notions ponctuelles, comme celles d’empreinte, d’indice et de témoignage. Le moteur de ce premier mouvement est la notion d’événement. Abordée d’un point de vue phénoménologique (Zarader, Marion, Dastur, Diano), elle nous permettra d’observer la photographie et l’histoire d’après la génétique de leur construction. Finalement, Beyrouth et son histoire façonnées par les images constituent le cadre à l’intérieur duquel s’organise le deuxième mouvement. Les analyses des œuvres de Sophie Ristelhueber (Beyrouth photographies, 1984), Robert Frank (Come again, 1991) et Lamia Joreige (Beyrouth, autopsie d’une ville, 2010) sont conçues comme autant d’espaces dialogiques entre la photographie, l’épistémologie de l’histoire et les événements historiques qu’elles représentent. Le propos est de faire ressortir le basculement qu’elles mettent en scène : de la chronique vers l’écriture d’histoire.