115 resultados para États affectifs
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Résumé: L'impact de la maladie d'Alzheimer (MA) est dévastateur pour la vie quotidienne de la personne affectée, avec perte progressive de la mémoire et d'autres facultés cognitives jusqu'à la démence. Il n'existe toujours pas de traitement contre cette maladie et il y a aussi une grande incertitude sur le diagnostic des premiers stades de la MA. La signature anatomique de la MA, en particulier l'atrophie du lobe temporal moyen (LTM) mesurée avec la neuroimagerie, peut être utilisée comme un biomarqueur précoce, in vivo, des premiers stades de la MA. Toutefois, malgré le rôle évident du LMT dans les processus de la mémoire, nous savons que les modèles anatomiques prédictifs de la MA basés seulement sur des mesures d'atrophie du LTM n'expliquent pas tous les cas cliniques. Au cours de ma thèse, j'ai conduit trois projets pour comprendre l'anatomie et le fonctionnement du LMT dans (1) les processus de la maladie et dans (2) les processus de mémoire ainsi que (3) ceux de l'apprentissage. Je me suis intéressée à une population avec déficit cognitif léger (« Mild Cognitive Impairment », MCI), à risque pour la MA. Le but du premier projet était de tester l'hypothèse que des facteurs, autres que ceux cognitifs, tels que les traits de personnalité peuvent expliquer les différences interindividuelles dans le LTM. De plus, la diversité phénotypique des manifestations précliniques de la MA provient aussi d'une connaissance limitée des processus de mémoire et d'apprentissage dans le cerveau sain. L'objectif du deuxième projet porte sur l'investigation des sous-régions du LTM, et plus particulièrement de leur contribution dans différentes composantes de la mémoire de reconnaissance chez le sujet sain. Pour étudier cela, j'ai utilisé une nouvelle méthode multivariée ainsi que l'IRM à haute résolution pour tester la contribution de ces sous-régions dans les processus de familiarité (« ou Know ») et de remémoration (ou « Recollection »). Finalement, l'objectif du troisième projet était de tester la contribution du LTM en tant que système de mémoire dans l'apprentissage et l'interaction dynamique entre différents systèmes de mémoire durant l'apprentissage. Les résultats du premier projet montrent que, en plus du déficit cognitif observé dans une population avec MCI, les traits de personnalité peuvent expliquer les différences interindividuelles du LTM ; notamment avec une plus grande contribution du neuroticisme liée à une vulnérabilité au stress et à la dépression. Mon étude a permis d'identifier un pattern d'anormalité anatomique dans le LTM associé à la personnalité avec des mesures de volume et de diffusion moyenne du tissu. Ce pattern est caractérisé par une asymétrie droite-gauche du LTM et un gradient antéro-postérieur dans le LTM. J'ai interprété ce résultat par des propriétés tissulaires et neurochimiques différemment sensibles au stress. Les résultats de mon deuxième projet ont contribué au débat actuel sur la contribution des sous-régions du LTM dans les processus de familiarité et de remémoration. Utilisant une nouvelle méthode multivariée, les résultats supportent premièrement une dissociation des sous-régions associées aux différentes composantes de la mémoire. L'hippocampe est le plus associé à la mémoire de type remémoration et le cortex parahippocampique, à la mémoire de type familiarité. Deuxièmement, l'activation correspondant à la trace mnésique pour chaque type de mémoire est caractérisée par une distribution spatiale distincte. La représentation neuronale spécifique, « sparse-distributed», associée à la mémoire de remémoration dans l'hippocampe serait la meilleure manière d'encoder rapidement des souvenirs détaillés sans interférer les souvenirs précédemment stockés. Dans mon troisième projet, j'ai mis en place une tâche d'apprentissage en IRM fonctionnelle pour étudier les processus d'apprentissage d'associations probabilistes basé sur le feedback/récompense. Cette étude m'a permis de mettre en évidence le rôle du LTM dans l'apprentissage et l'interaction entre différents systèmes de mémoire comme la mémoire procédurale, perceptuelle ou d'amorçage et la mémoire de travail. Nous avons trouvé des activations dans le LTM correspondant à un processus de mémoire épisodique; les ganglions de la base (GB), à la mémoire procédurale et la récompense; le cortex occipito-temporal (OT), à la mémoire de représentation perceptive ou l'amorçage et le cortex préfrontal, à la mémoire de travail. Nous avons également observé que ces régions peuvent interagir; le type de relation entre le LTM et les GB a été interprété comme une compétition, ce qui a déjà été reporté dans des études récentes. De plus, avec un modèle dynamique causal, j'ai démontré l'existence d'une connectivité effective entre des régions. Elle se caractérise par une influence causale de type « top-down » venant de régions corticales associées avec des processus de plus haut niveau venant du cortex préfrontal sur des régions corticales plus primaires comme le OT cortex. Cette influence diminue au cours du de l'apprentissage; cela pourrait correspondre à un mécanisme de diminution de l'erreur de prédiction. Mon interprétation est que cela est à l'origine de la connaissance sémantique. J'ai également montré que les choix du sujet et l'activation cérébrale associée sont influencés par les traits de personnalité et des états affectifs négatifs. Les résultats de cette thèse m'ont amenée à proposer (1) un modèle expliquant les mécanismes possibles liés à l'influence de la personnalité sur le LTM dans une population avec MCI, (2) une dissociation des sous-régions du LTM dans différents types de mémoire et une représentation neuronale spécifique à ces régions. Cela pourrait être une piste pour résoudre les débats actuels sur la mémoire de reconnaissance. Finalement, (3) le LTM est aussi un système de mémoire impliqué dans l'apprentissage et qui peut interagir avec les GB par une compétition. Nous avons aussi mis en évidence une interaction dynamique de type « top -down » et « bottom-up » entre le cortex préfrontal et le cortex OT. En conclusion, les résultats peuvent donner des indices afin de mieux comprendre certains dysfonctionnements de la mémoire liés à l'âge et la maladie d'Alzheimer ainsi qu'à améliorer le développement de traitement. Abstract: The impact of Alzheimer's disease is devastating for the daily life of the affected patients, with progressive loss of memory and other cognitive skills until dementia. We still lack disease modifying treatment and there is also a great amount of uncertainty regarding the accuracy of diagnostic classification in the early stages of AD. The anatomical signature of AD, in particular the medial temporal lobe (MTL) atrophy measured with neuroimaging, can be used as an early in vivo biomarker in early stages of AD. However, despite the evident role of MTL in memory, we know that the derived predictive anatomical model based only on measures of brain atrophy in MTL does not explain all clinical cases. Throughout my thesis, I have conducted three projects to understand the anatomy and the functioning of MTL on (1) disease's progression, (2) memory process and (3) learning process. I was interested in a population with mild cognitive impairment (MCI), at risk for AD. The objective of the first project was to test the hypothesis that factors, other than the cognitive ones, such as the personality traits, can explain inter-individual differences in the MTL. Moreover, the phenotypic diversity in the manifestations of preclinical AD arises also from the limited knowledge of memory and learning processes in healthy brain. The objective of the second project concerns the investigation of sub-regions of the MTL, and more particularly their contributions in the different components of recognition memory in healthy subjects. To study that, I have used a new multivariate method as well as MRI at high resolution to test the contribution of those sub-regions in the processes of familiarity and recollection. Finally, the objective of the third project was to test the contribution of the MTL as a memory system in learning and the dynamic interaction between memory systems during learning. The results of the first project show that, beyond cognitive state of impairment observed in the population with MCI, the personality traits can explain the inter-individual differences in the MTL; notably with a higher contribution of neuroticism linked to proneness to stress and depression. My study has allowed identifying a pattern of anatomical abnormality in the MTL related to personality with measures of volume and mean diffusion of the tissue. That pattern is characterized by right-left asymmetry in MTL and an anterior to posterior gradient within MTL. I have interpreted that result by tissue and neurochemical properties differently sensitive to stress. Results of my second project have contributed to the actual debate on the contribution of MTL sub-regions in the processes of familiarity and recollection. Using a new multivariate method, the results support firstly a dissociation of the subregions associated with different memory components. The hippocampus was mostly associated with recollection and the surrounding parahippocampal cortex, with familiarity type of memory. Secondly, the activation corresponding to the mensic trace for each type of memory is characterized by a distinct spatial distribution. The specific neuronal representation, "sparse-distributed", associated with recollection in the hippocampus would be the best way to rapidly encode detailed memories without overwriting previously stored memories. In the third project, I have created a learning task with functional MRI to sudy the processes of learning of probabilistic associations based on feedback/reward. That study allowed me to highlight the role of the MTL in learning and the interaction between different memory systems such as the procedural memory, the perceptual memory or priming and the working memory. We have found activations in the MTL corresponding to a process of episodic memory; the basal ganglia (BG), to a procedural memory and reward; the occipito-temporal (OT) cortex, to a perceptive memory or priming and the prefrontal cortex, to working memory. We have also observed that those regions can interact; the relation type between the MTL and the BG has been interpreted as a competition. In addition, with a dynamic causal model, I have demonstrated a "top-down" influence from cortical regions associated with high level cortical area such as the prefrontal cortex on lower level cortical regions such as the OT cortex. That influence decreases during learning; that could correspond to a mechanism linked to a diminution of prediction error. My interpretation is that this is at the origin of the semantic knowledge. I have also shown that the subject's choice and the associated brain activation are influenced by personality traits and negative affects. Overall results of this thesis have brought me to propose (1) a model explaining the possible mechanism linked to the influence of personality on the MTL in a population with MCI, (2) a dissociation of MTL sub-regions in different memory types and a neuronal representation specific to each region. This could be a cue to resolve the actual debates on recognition memory. Finally, (3) the MTL is also a system involved in learning and that can interact with the BG by a competition. We have also shown a dynamic interaction of « top -down » and « bottom-up » types between the pre-frontal cortex and the OT cortex. In conclusion, the results could give cues to better understand some memory dysfunctions in aging and Alzheimer's disease and to improve development of treatment.
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Les espaces politiques infranationaux définissent et prennent en charge un nombre croissant de problèmes publics. Quelle est la capacité des acteurs et institutions locales à faire émerger une action publique autonome ? Assiste-t-on à la fin d'un cycle ou à une nouvelle transformation des relations entre l'Etat et le local ? Quelles sont les limites de la capacité du politique à organiser les territoires ? Les collectivités locales favorisent-elles de nouvelles impulsions démocratiques ? Cette volonté de croiser les regards - disciplinaires, géographiques et générationnels - permet aux auteurs de souligner l'étendue du travail de construction de la comparabilité en sciences sociales. L'enjeu scientifique n'est plus de trancher entre centralisation et décentralisation mais bien de développer des outils et des cadres d'analyse heuristiques pour penser les effets des nouvelles interdépendances. L'ouvrage nous invite aussi à poser différemment la question sensible du rapport des individus à l'Etat et au pouvoir politique dans chaque contexte local , à questionner les ressorts démocratiques de l'action publique au coeur de chaque métropole et de chaque région.
Je t'aide moi non plus: biologique, comportemental ou psychologique, l'altruisme dans tous ses états
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« Je t'aime moi non plus », le titre de la fameuse chanson de Gainsbourg reflète de manière exquise ce que la vie a de beau et d'amer à la fois. A défaut de traiter d'amour, cet ouvrage analyse les méandres de l'aide à sens unique. L'altruisme, ce comportement de don sans attente de retour de service, est abordé ici de manière scientifique et philosophique plutôt que poétique et littéraire. Un objectif est d'en traquer les mécanismes sous-jacents, ceux qui échappent à tout romantisme et se traduisent souvent en calculs de coûts et bénéfices. Il s'agit également d'approfondir les diverses manières de comprendre et de pratiquer l'altruisme. Souvent considéré comme une des plus grandes vertus humaines, l'objet de nombreux écrits philosophiques et psychologiques, l'altruisme peut-il se trouver chez les abeilles et les marmottes ? Posez la question à un biologiste de l'évolution et il vous répondra « Mais oui, évidemment ! ». A première vue, une telle réponse est consternante mais nous verrons qu'à y regarder de plus près, les philosophes et les biologistes ne parlent pas exactement de la même chose en utilisant le même terme. L'hétérogénéité des disciplines intéressées à l'altruisme et des contextes théoriques dans lesquels il est utilisé en ont fait une notion extrêmement complexe et difficile à saisir. Au sein des différentes sciences sociales et du vivant, l'altruisme est un élément pivot dans trois débats dont cet ouvrage prend le temps de retracer les contours. Tantôt, l'altruisme se profile en danger (apparent) pour la théorie de l'évolution darwinienne (chap. 1), tantôt, il sert de cheval de bataille dans la croisade contre l'idéal de l'homo economicus si souvent prôné en économie (chap. 2 et 3), tantôt il est une énigme à découvrir dans les méandres de nos motivations intimes (chap. 3). Dans le cadre de ces différents débats, la notion d'altruisme prend des significations sensiblement différentes. Pour en rendre compte, l'ensemble de l'ouvrage s'articule autour d'une triple distinction fondamentale : l'altruisme peut être compris au sens biologique, comportemental ou psychologique. Chacune de ces notions est utilisée dans un contexte spécifique au sein de sciences qui ont leurs propres traditions et leurs propres débats internes. La structure de l'ouvrage est organisée en fonction de cette triple distinction. Le premier chapitre est consacré à l'altruisme biologique, définit en termes de valeur de survie et de reproduction (fitness) : un comportement est altruiste s'il a pour effet d'augmenter la fitness d'autrui aux dépens de sa propre fitness. L'observation de comportements altruistes au sein du monde animal a posé un des plus grands défis à la théorie de l'évolution depuis la publication de l'Origine des espèces. Des générations de biologistes se sont attelés à la tâche d'expliquer comment un comportement qui augmente la fitness biologique d'autres organismes aux dépends de la fitness de l'agent a pu être sélectionnée au fil de l'évolution. Nous verrons que c'est grâce aux travaux de William Hamilton et d'autres que cette difficulté a pu être résolue. Le deuxième chapitre retrace les attaques d'une frange d'économistes (supportés dans leur effort critique par des théoriciens des jeux et anthropologues évolutionnistes), contre le modèle classique de l'homo economicus. Leur objectif est de montrer que des personnes ordinaires ne se comportement souvent pas en maximisateurs rationnels de leurs gains propres, comme le prédirait la théorie économique néo-classique. Dans le cadre de ce débat, c'est du comportement social spécifiquement humain et plus particulièrement de l'altruisme humain dont il est question. Le terme d'altruisme est alors utilisé dans un sens plus lâche que ne le font les biologistes ; ce que l'on appellera l'altruisme comportemental comprend les actions coûteuses pour l'agent et avantageuses pour autrui. La particularité humaine fournira également l'occasion de traiter la délicate question des rapports entre l'évolution génétique et la culture. Nous verrons que l'étude du comportement animal fournit les premiers éléments d'explication de l'altruisme humain, mais ce dernier ne peut être pleinement compris qu'au terme d'une analyse qui tient compte des capacités qui nous sont propres. Cette analyse nous permettra de saisir pourquoi les êtes humains sont à la fois plus sociaux et plus opportunistes (la contradiction n'est qu'apparente) que les autres espèces animales. Malgré leurs différences, les versions biologique et comportementale de l'altruisme sont très proches au sens où elles traitent des conséquences de comportements. Ces notions ne reflètent qu'imparfaitement la conception ordinaire que nous nous faisons de l'altruisme. L'altruisme tel qu'il est utilisé dans le langage courant correspond davantage à l'image que s'en font les philosophes et les psychologues. Pour déceler les actions altruistes, ces derniers se demandent généralement si elles ont été causées par un motif dirigé vers le bien d'autrui. En ce sens, on parle d'altruisme psychologique qui réfère aux causes plutôt qu'aux effets des actions d'aide. Le troisième chapitre est consacré aux débats qui font rage autour de la question de savoir si les êtres humains sont capables d'agir de manière altruiste psychologique, c'est-à-dire en fonction de motifs exclusivement dirigés vers le bien-être d'autrui. Nous verrons à quel point cette tâche est ardue à moins d'accepter de reformuler la question en termes de motivation primaire à l'action. Au terme de l'analyse, il apparaitra que les trois notions d'altruisme se croisent sans se recouper dans un enchevêtrement de liens plus ou moins complexes. Nous verrons par exemple que l'altruisme biologique (voire comportemental) pourrait bien être une condition nécessaire à l'évolution de l'altruisme psychologique ; des liens tangibles peut ainsi être tissés entre ces différentes notions. Les diverses approches du phénomène de l'altruisme retracées dans cet ouvrage fournissent également des clefs de compréhension des méandres du comportement social animal et plus particulièrement humain. De manière générale, sans apporter de solutions toutes faites, cet écrit peut servir de guide sémantique et initie le lecteur à une littérature interdisciplinaire émergeante, foisonnante, passionnante quoique encore souvent parsemée de confusions et de contradictions.
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Réalisée dans le cadre du projet de recherche initié à la section d'histoire et esthétique du cinéma de l'Université de Lausanne autour du concept « d'Épistémè 1900 », cette thèse cherche à mettre en rapport dialogique deux « ensembles » formés par l'histoire du cinéma et l'histoire des sciences du psychisme dans une période circonscrite entre 1880 et 1910. Il s'agit de repenser les liens entre cinéma et sciences du psychisme, chacun de ces ensembles discursifs étant traités au même niveau en tant qu'objets historiques de savoir qui ont des choses à nous apprendre sur le cinéma en tant que phénomène culturel, anthropologique et social. Au passage du siècle, cinéma et sciences du psychisme se rencontrent au coeur d'une nouvelle problématisation du sujet définie par des savoirs scientifiques et parascientifiques alors confrontés aux phénomènes intriguants de l'hystérie et de l'hypnose. L'hystérie et l'hypnose provoquent des états nerveux lesquels constituent un terrain propice au développement de sujets divisés, hallucinés et intrancés, conduisant les médecins et psychologues à remettre en question l'idée d'un moi homogène et contrôlé. L'expansion d'une culture névrotique fabriquant à la chaîne des corps automatiques voués à leur inconscient cérébral permet de rapprocher le cinéma et les théories du psychisme sur une base qui a été rarement explorée jusqu'ici, en particulier relativement à la construction (théorique) du spectateur de cinéma. Si le dispositif cinématographique en tant que technique, représentation et modèle de pensée reprend à son compte l'imaginaire médical de cette époque, il contribue également en retour à façonner une conception de la subjectivité étroitement tributaire des technologies contemporaines et des fantasmes qu'elles génèrent. Aux côtés des personnages hystériques filmés par les premiers opérateurs, les spectateurs tels que décrits dans les textes-sources participent, d'une part à attester de la persistance du modèle neuro-pathologique dans la culture visuelle du début du XXe siècle, et d'autre part à transformer la vision savante du sujet dans ses rapports perceptifs et affectifs avec le monde environnant. C'est donc dans une logique d'interactions réciproques qu'il faut envisager les rapports entre le cinéma (conçu ici essentiellement comme comme un dispositif réunissant un appareillage, une image et un spectateur) et les connaissances relatives à l'intériorité psychique qui s'élaborent dans le domaine des sciences médico-psychologiques. Pour étudier ces rapports, j'ai choisi la figure du spectateur puisque les théories du psychisme s'intéressent prioritairement à l'humain et à sa subjectivité. À partir de cette figure-clé, j'ai tenté de montrer comment le spectacle cinématographique et les sciences du psychisme participent à des réflexions sur l'avènement d'une nouvelle forme de subjectivité consonante avec la modernité, une modernité qui bouleverse la manière d'envisager le fonctionnement de l'appareil psychique, donc les rapports de l'individu à soi-même et à ses images, mais aussi aux autres et au monde en général. Les croisements entre le sujet du cinéma et le sujet des sciences du psychisme s'effectuent autour de quatre paradigmes selon moi définitoires de la subjectivité autour de 1900 et structurant l'ensemble de cette recherche : la fatigue, le choc, l'hallucination et l'hypnose. En parcourant les sources, on s'aperçoit en effet qu'elles envisagent le corps humain tantôt comme une machine (un corps thermodynamique et électrophysiologique), tantôt comme hystérique ou neurasthénique (un corps traumatique et dysfonctionnel), tantôt comme rêveur (un corps producteur d'images et de sons perçus sur un mode hallucinatoire), tantôt comme hypermnésique (un corps de « clichés-souvenirs » emmagasinés à l'infini), tantôt comme hypnotisé (un corps suggestionné et contagieux). Tous ces corps, au final, ne forment qu'un seul corps générique, c'est-à-dire construisent et qualifient le corps nerveux des sciences du psychisme qui se manifeste sous différentes facettes en fonction des pathologies et des situations. À la fois unique et multiple, ce corps nerveux subsume le corpsmachine, le corps traumatisé, le corps halluciné et le corps hypnotisé qui font l'objet d'analyse détaillées dans les différentes parties de la thèse. Ces quatre grands « corps » retenus comme autant de déclinaisons possibles du corps nerveux sont directement mis en rapport avec quatre concepts : la fatigue, le choc, l'hallucination et l'hypnose - ce choix s'imposant face au constat de leur récurrence suite au dépouillement de nombreuses sources. J'ai tenté, au cours de ce travail, de défendre plusieurs hypothèses (ou séries d'hypothèses) relatives à l'avènement du spectateur cinématographique autour de 1900. Corrélées les unes aux autres, elles gagnent à être comprises ensemble. 1) Les sciences du psychisme et les discours sur les spectacles et dispositifs audiovisuels contribuent, dans leurs échanges, à la construction du sujet moderne, un sujet né de la révolution industrielle et s'épanouissant grâce à la culture de masse. La culture de masse met en scène des corps nerveux (automatiques, traumatisés, hallucinés et hypnotisés) dont la démultiplication sous différentes formes et en différents lieux fait émerger un nouveau modèle de subjectivité. Si le cinéma constitue un laboratoire expérimental du corps nerveux, il participe également à la transformation du corps nerveux en sujet nerveux, c'est-à-dire en un sujet moderne jouissant d'un nervosisme mué en modèle culturel. 2) Le cinématographe devient autour de 1900 un dispositif modélisateur pour les sciences du psychisme qui conceptualisent le fonctionnement de l'appareil psychique sous les espèces d'une machine projetant des sons et des images. En tant qu'opérateur de pensée, le cinéma offre une pluralité de modèles épistémologiques possibles, suivant que l'on s'intéresse à son fonctionnement général, ses détails techniques, ses effets sur les spectateurs, sa dimension spectaculaire et populaire. Par conséquent, le cinéma peut étayer une variété d'objets dans le champ des sciences médicales : le corps, l'esprit, la pensée, l'imagination, le rêve, l'hallucination, l'hypnose, la psychose ; mais aussi le corps individuel ou social, qu'ils soient sains ou malades. C'est sur cette base, j'en viens à penser que le spectateur de cinéma sert de modèle au sujet nerveux des sciences médicales. 3) Le rôle modélisateur du cinéma provoque en effet des modifications dans la manière de théoriser le corps nerveux puisqu'il fait transiter le corps nerveux de la psychopathologie vers le sujet nerveux de la culture spectaculaire moderne. Le spectateur du cinéma des premiers temps apparaît comme le prototype du sujet sidéré par le spectacle du monde moderne, prenant plaisir à être surstimulé et se prêtant volontiers au jeu de l'illusion de réalité. Actualisant un modèle de spectatorialité ambivalent, balançant entre hystérie et hypnose, le spectateur cinématographique intègre les codes de la maladie nerveuse pour leur donner une nouvelle dimension (esthétique, artistique) sur la scène sociale. 4) Les trois premières séries d'hypothèses ne peuvent être validées que si l'on examine comment les discours sur le cinéma pré-institutionnel se sont appropriés la culture du corps nerveux, de sorte à façonner un modèle de spectatorialité étayé sur les valeurs féminines d'impressionnabilité, d'excitabilité et de sentimentalité (des valeurs culturellement construites). Partant, j'ai voulu montrer que si durant la première phase de son histoire, le spectacle cinématographique fait l'objet d'une hystéricisation de la part des discours qui l'annexent à la sphère féminine de la culture de masse, dans sa phase d'institutionnalisation, on assiste à un processus de masculinisation du modèle spectatoriel (mais également, des lieux d'exibition, du mode de production, du mode de représentation, etc.).
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Summary : International comparisons in the area of victimization, particularly in the field of violence against women, are fraught with methodological problems that previous research has not systematically addressed, and whose answer does not seem to be agreed up~n. For obvious logistic and financial reasons, international studies on violence against women (i.e. studies that administer the same instrument in different countries). are seldom; therefore, researchers are bound to resort to secondary comparisons. Many studies simply juxtapose their results to the ones of previous wòrk or to findings obtained in different contexts, in order to offer an allegedly comparative perspective to their conclusions. If, most of the time, researchers indicate the methodological limitations of a direct comparison, it is not rare that these do not result in concrete methodological controls. Yet, many studies have shown the influence of surveys methodological parameters on findings, listing recommendations fora «best practice» of research. Although, over the past decades, violence against women surveys have become more and more similar -tending towards a sort of uniformization that could be interpreted as a passive consensus -these instruments retain more or less subtle differences that are still susceptible to influence the validity of a comparison. Yet, only a small number of studies have directly worked on the comparability of violence against women data, striving to control the methodological parameters of the surveys in order to guarantee the validity of their comparisons. The goal of this work is to compare data from two national surveys on violence against women: the Swiss component of the International Violence Against Women Survey [CH-IVAWS] and the National Violence Against Women Survey [NVAWS] administered in the United States. The choice of these studies certainly ensues from the author's affiliations; however, it is far from being trivial. Indeed, the criminological field currently endows American and Anglo-Saxon literature with a predominant space, compelling researchers from other countries to almost do the splits to interpret their results in the light of previous work or to develop effective interventions in their own context. Turning to hypotheses or concepts developed in a specific framework inevitably raises the issue of their applicability to another context, i.e. the Swiss context, if not at least European. This problematic then takes on an interest that goes beyond the particular topic of violence against women, adding to its relevance. This work articulates around three axes. First, it shows the way survey characteristics influence estimates. The comparability of the nature of the CH-IVAWS and NVAWS, their sampling design and the characteristics of their administration are discussed. The definitions used, the operationalization of variables based on comparable items, the control of reference periods, as well as the nature of the victim-offender relationship are included among controlled factors. This study establishes content validity within and across studies, presenting a systematic process destined to maximize the comparability of secondary data. Implications of the process are illustrated with the successive presentation of comparable and non-comparable operationalizations of computed variables. Measuring violence against. women in Switzerland and the United-States, this work compares the prevalence of different forms (threats, physical violence and sexual violence) and types of violence (partner and nonpartner violence). Second, it endeavors to analyze concepts of multivictimization (i.e. experiencing different forms of victimization), repeat victimization (i.e. experiencing the same form of violence more than once), and revictimization (i.e. the link between childhood and adulthood victimization) in a comparative -and comparable -approach. Third, aiming at understanding why partner violence appears higher in the United States, while victims of nonpartners are more frequent in Switzerland, as well as in other European countries, different victimization correlates are examined. This research contributes to a better understanding of the relevance of controlling methodological parameters in comparisons across studies, as it illustrates, systematically, the imposed controls and their implications on quantitative data. Moreover, it details how ignoring these parameters might lead to erroneous conclusions, statistically as well as theoretically. The conclusion of the study puts into a wider perspective the discussion of differences and similarities of violence against women in Switzerland and the United States, and integrates recommendations as to the relevance and validity of international comparisons, whatever the'field they are conducted in. Résumé: Les comparaisons internationales dans le domaine de la victimisation, et plus particulièrement en ce qui concerne les violences envers les femmes, se caractérisent par des problèmes méthodologiques que les recherches antérieures n'ont pas systématiquement adressés, et dont la réponse ne semble pas connaître de consensus. Pour des raisons logistiques et financières évidentes, les études internationales sur les violences envers les femmes (c.-à-d. les études utilisant un même instrument dans différents pays) sont rares, aussi les chercheurs sont-ils contraints de se tourner vers des comparaisons secondaires. Beaucoup de recherches juxtaposent alors simplement leurs résultats à ceux de travaux antérieurs ou à des résultats obtenus dans d'autres contextes, afin d'offrir à leurs conclusions une perspective prétendument comparative. Si, le plus souvent, les auteurs indiquent les limites méthodologiques d'une comparaison directe, il est fréquent que ces dernières ne se traduisent pas par des contrôles méthodologiques concrets. Et pourtant, quantité de travaux ont mis en évidence l'influence des paramètres méthodologiques des enquêtes sur les résultats obtenus, érigeant des listes de recommandations pour une «meilleure pratique» de la recherche. Bien que, ces dernières décennies, les sondages sur les violences envers les femmes soient devenus de plus en plus similaires -tendant, vers une certaine uniformisation que l'on peut interpréter comme un consensus passif-, il n'en demeure pas moins que ces instruments possèdent des différences plus ou moins subtiles, mais toujours susceptibles d'influencer la validité d'une comparaison. Pourtant, seules quelques recherches ont directement travaillé sur la comparabilité des données sur les violences envers les femmes, ayant à coeur de contrôler les paramètres méthodologiques des études utilisées afin de garantir la validité de leurs comparaisons. L'objectif de ce travail est la comparaison des données de deux sondages nationaux sur les violences envers les femmes: le composant suisse de l'International Violence Against Women Survey [CHIVAWSj et le National Violence Against Women Survey [NVAWS) administré aux États-Unis. Le choix de ces deux études découle certes des affiliations de l'auteure, cependant il est loin d'être anodin. Le champ criminologique actuel confère, en effet, une place prépondérante à la littérature américaine et anglo-saxonne, contraignant ainsi les chercheurs d'autres pays à un exercice proche du grand écart pour interpréter leurs résultats à la lumière des travaux antérieurs ou développer des interventions efficaces dans leur propre contexte. Le fait de recourir à des hypothèses et des concepts développés dans un cadre spécifique pose inévitablement la question de leur applicabilité à un autre contexte, soit ici le contexte suisse, sinon du moins européen. Cette problématique revêt alors un intérêt qui dépasse la thématique spécifique des violences envers les femmes, ce qui ajoute à sa pertinence. Ce travail s'articule autour de trois axes. Premièrement, il met en évidence la manière dont les caractéristiques d'un sondage influencent les estimations qui en découlent. La comparabilité de la nature du CH-IVAWS et du NVAWS, de leur processus d'échantillonnage et des caractéristiques de leur administration est discutée. Les définitions utilisées, l'opérationnalisation des variables sur la base d'items comparables, le contrôle des périodes de référence, ainsi que la nature de la relation victime-auteur figurent également parmi les facteurs contrôlés. Ce travail établit ainsi la validité de contenu intra- et inter-études, offrant un processus systématique destiné à maximiser la comparabilité des données secondaires. Les implications de cette démarche sont illustrées avec la présentation successive d'opérationnalisations comparables et non-comparables des variables construites. Mesurant les violences envers les femmes en Suisse et aux États-Unis, ce travail compare la prévalence de plusieurs formes (menaces, violences physiques et violences sexuelles) et types de violence (violences partenaires et non-partenaires). 11 s'attache également à analyser les concepts de multivictimisation (c.-à-d. le fait de subir plusieurs formes de victimisation), victimisation répétée (c.-à.-d. le fait de subir plusieurs incidents de même forme) et revictimisation (c.-à-d. le lien entre la victimisation dans l'enfance et à l'âge adulte) dans une approche comparative - et comparable. Dans un troisième temps, cherchant à comprendre pourquoi la violence des partenaires apparaît plus fréquente aux États-Unis, tandis que les victimes de non-partenaires sont plus nombreuses en Suisse, et dans d'autres pays européens, différents facteurs associés à la victimisation sont évalués. Cette recherche participe d'une meilleure compréhension de la pertinence du contrôle des paramètres méthodologiques dans les comparaisons entre études puisqu'elle illustre, pas à pas, les contrôles imposés et leurs effets sur les données quantitatives, et surtout comment l'ignorance de ces paramètres peut conduire à des conclusions erronées, tant statistiquement que théoriquement. La conclusion replace, dans un contexte plus large, la discussion des différences et des similitudes observées quant à la prévalence des violences envers les femmes en Suisse et aux États-Unis, et intègre des recommandations quant à la pertinence et à la validité des comparaisons internationales, cela quel que soit le domaine considéré.